Au-delà du constat, devenu trivial, du recul de la norme « fordienne », comment penser la dynamique des normes du temps de travail ? Observe-t-on un effondrement de cette dernière ? Les nouvelles normes peuvent-elles être résumées par le développement d'un « temps choisi » ? S'agit-il d'un éclatement total, avec la multiplication de compromis et d'arrangements locaux ? Pour répondre à ces questions on propose d'abord une définition des normes sociales mettant l'accent sur la nécessité de prendre en compte le point de vue de l'expérience des salariés dans la compréhension de leur dynamique. On avance ensuite une définition élargie des normes sociales du temps de travail incluant les dimensions du temps de l'emploi, en évoquant les principales logiques techno-économiques et sociales - pas toujours convergentes - qui animent les transformations en cours. On définit enfin trois normes temporelles idéales-typiques - « norme fordienne », « norme flexible hétéronome », « norme flexible autonome » - à partir desquelles on indique à quels profils sociaux de travailleurs et à quelles modalités concrètes d'organisation du temps de travail elles correspondent. Flexibilité subie et flexibilité choisies doivent impérativement être distinguées, la première renvoyant à une norme salariale au sens faible de la notion de norme : elle n'est guère associée à des valeurs positives et ne participe pas de la construction de compromis sociaux dynamiques.